Espagne : à la découverte du rio Ebro
Par Gollum | Le 15/02/2015Octobre 2014
Après quelques jours à Barcelone, mon amie et moi arrivons à Mora d'Ebre, un petit village d'Espagne au bord d'un fleuve très prisé par les pêcheurs : l'Ebro (en espagnol, ou Ebre en catalan et français). Nous sommes fin octobre, il fait un petit 30 degrés ici... Et un grand soleil, évidemment !
Pour ceux qui ne connaissent pas ce fleuve, l'Ebro est réputé pour sa très grosse densité en gros silures et carpes magnifiques. Mais les nombreux gros chevesnes, barbeaux, sandres et black-bass ne sont pas en reste non plus. Et je ne parle même pas des gardons qui dépassent les 2 kilos.
Bref, vous l'aurez compris, cet endroit est une merveille et je suis fébrile à l'idée de pouvoir y pêcher une pleine semaine ! D'autant que la situation de notre gîte est tout simplement parfaite : on pourrait (presque) pêcher du salon ...
En plus, les bordures sont accessibles et pêchables sur environ 150 mètres, sur les 2 berges. C'est suffisamment rare dans la région pour être souligné ! Excepté les abords du gîte, la quasi-totalité de la rivière n'est accessible que par bateau.
1er jour
Afin d'avoir une première idée de la pêche par ici, je débute par une petite matinée à l'anglaise, en agrainant simplement du maïs, avec une ligne en 20/100 et hameçon 12. Histoire de garder mes chances si les carpes sont aussi nombreuses et énergiques que ce que racontent certaines histoires vues sur le net.
Au large, le courant est très impressionnant ! Et si le gros contre-courant dans lequel je pêche est abordable, cela reste tout de même assez agité et, surtout, profond : 3,5 mètres de fond à 6 ou 7 mètres du bord.
Je n'ai pas besoin de réfléchir bien longtemps : à la 2ème coulée, je pique un premier petit chevesne, puis un petit carpeau bien vivace.
Et ça s'enchaine comme ça pendant 2h : au final, une trentaine de poissons entre 100 et 300 grammes sont sortis. Pas trop mal pour une entrée en matière.
A noter qu'en Espagne, les bourriches sont interdites. Donc exit les belles photos de fin de pêche ... dommage.
Maintenant, il va falloir sélectionner la taille des poissons ...
En début d'aprem, je pars explorer la berge, coté "sauvage", avec en tout et pour tout une canne feeder, un peu d'amorce et juste le matériel minimum.
Je finis par trouver un micro-poste, perdu au milieu des bois et des hautes herbes. La rivière n'a pas du tout le même profil ici : pour tout dire, cela ressemble très fortement à la Loire. 2 mètres de fond maximum, un courant très puissant et des algues de partout.
Je tente un feeder de 80 grammes en lançant à une douzaine de mètre. La rigolade ... ça touche à peine le fond et dérive à la vitesse d'un flotteur pour ablette. Je passe à 120 grammes puis à 150 grammes (mon max sur cette canne). Peine perdue, même comme ça, le feeder glisse irrémédiablement.
Bon, tout est à revoir : le poste, la technique et le matériel !
Retour au pied du gîte, je vais essayer au feeder en fin de courant. Avec 80 grammes, dans un petit contre-courant, ça tient. Ca semble encore relativement profond - 5 mètres au moins. Mais après 3h et seulement 2 mini-carpeaux sortis, je dois me rendre à l'évidence : quelque chose cloche dans ma pêche ! J'ai pourtant vu et entendu quelques très gros ploufs qui inspire confiance ...
2ème jour
Vu que l'agrainage de maïs avait bien fonctionné, j'ai fait un petit amorçage la veille au soir avec 1 kilos de maïs et 3 kilos de pellets. Ce matin, c'est donc grande canne et agrainage.
Il y a de plus en plus d'algues qui dérivent : normal pour une fin de saison. Mais ça rend la conduite de ligne assez délicate. Et pour ne pas faciliter les choses, les courants sont très changeant. Bref, mon agrainage part dans tous les sens et ma ligne aussi;
Malgré tout, les (petits) poissons sont au rendez-vous : en 3h, je sors au moins une centaine de chevesnes, gardons et carpeaux de 80 à 400 grammes environ. Mais toujours pas le moindre gros à l'horizon.
Le soir, je retente au feeder, sur un poste différent, plus profond et plus proche du courant principal.
Pas la moindre touche.
3ème jour
Je passe en mode carpiste : une ligne en plombée avec sac soluble et pellets/maïs sur le cheveu.
Et une autre ligne pour le silure avec du foie de boeuf.
Et oui, en Espagne, il est interdit de pêcher au vif, au mort, ou avec n'importe quel animal ou mollusque marin. Exit donc les sardines, calamars, etc ... Du coup, l'alternative principal utilisée dans le coin pour pêcher le silure au posée, c'est le foie de boeuf ... ou le blanc de poulet !
Après une matinée de galères (accrochages, algues par paquet de 10 kilos, etc ...) et un capot, je re-tente les mêmes techniques mais en changeant de poste, sur la berge d'en face, ce qui permet de pêcher cette fois vraiment "dans" le courant principal.
Et ben non, rien là non plus ... Ca sent le roussi !
Cela dit, je commence à soupçonner très fortement le poste : il y a des gros poissons, c'est certain... mais la pression de pêche est énorme ! Etant donnée qu'il s'agit des seuls berges accessibles sur plusieurs dizaines de kilomètres, il y a tous les jours de (très) nombreux pêcheurs !
D'ailleurs, ma pêche de petits poissons de la veille n'est pas passée inaperçue : pas moins de 5 pêcheurs ( !!! ) sont désormais installés sur mon poste amorcé la veille, et ils n'en bougeront plus de la semaine.
C'est déprimant ... même en habitant littéralement au dessus du poste, je ne peux pas y pêcher car il y a toujours quelqu'un du matin au soir.
En discutant avec le propriétaire du gite, j'apprend alors qu'il y a un (petit) coin accessible du bord et très peu pêché des locaux, car un peu éloigné dans la montagne et dont le chemin d'accès est minuscule et bien caché.
C'est décidé, je vais essayer !
4ème jour
Ce nouveau poste est magnifique et sent le poisson à plein nez !
Je démarre à l'anglaise et commence à sonder sous la canne, pour commencer. Heu ... oops ! Il y a à vue de nez 8 à 9 mètres de fond ...
Du coup, je change mon fusil d'épaule et j'essaye entre deux eaux, voire même en surface, en agrainant maïs et micro-pellets. Après tout, je n'ai pas encore essayé cette option !
Après 2h et une bonne quarantaine de petits chevesnes et carpeaux, je m'amuse bien mais je ne suis pas plus avancé dans ma recherche de gros poissons.
Changement de technique : j'amorce un peu plus "lourd" qu'avant et je passe en plombée light (10 grammes, c'est le max que j'ai sur moi, j'étais parti pour l'anglaise...). Je ne suis pas sur que l'amorce arrive au bon endroit car il y a quand même quelques contre-courants.
Mais finalement, je n'ai pas trop le temps le temps de tergiverser : la canne plie et le moulinet se mets à siffler avant même que je puisse ferrer !
Yes, enfin ! ... et non, décroché après quelques minutes...
Au final, j'aurais 5 départs de "vrais" carpes : 2 décroches, 2 casses et un hameçon ouvert. Entre le fort courant tout proche et les gros massifs d'algues le long des rochers, les combats sont corsés.
Mais au moins, la technique est bonne et le poste aussi. Reste plus qu'à changer de matos ! Ca commence à sentir bon tout ça !
5ème jour
Aujourd'hui, c'est sortie en bateau avec un guide. Objectif : du bon gros moustachu !
Bob (le guide) m'explique la stratégie du jour : nous allons pêcher une dizaine de postes différents, de 30 minutes à 1h chacun, afin de trouver rapidement un groupe de poissons actifs. S'il n'y a aucun poisson actif visible, on bouge rapidement.
Nous ferons 6 ou 7 postes dans la journées, en boucle : un mauvais poste le matin peut tout à fait changer du tout au tout l'après-midi.
La technique est simple, voire rustique : une plombée, un bas de ligne en tresse 80 kilos minimum, un hameçon 7/0 .... et un gros morceau de foie de boeuf !
Les postes sont magnifiques et "sentent" le poisson à vue d'oeil !
D'ailleurs, l'un d'eux est en fait ... juste en face de "mon" poste à carpe de la veille ! Bob m'explique que, là où je pêchais la carpe, la berge longeant la falaise est très profonde et avec pleins de "trous", permettant aux poissons de s'y réfugier quand ils sont peu actifs. Et nous pêchons en face car, lorsque les silures sortent de leur trou, ils traversent le fort courant pour remonter ensuite dans les bordures, au milieu des algues ... là où nous les attendons !
Pas besoin de pêcher bien loin donc : 10 mètres est largement suffisant.
En fin de journée, après avoir parcouru quelques kilomètres de rivière sans voir d'activité, un premier poisson titille discrètement la canne de Bob ... puis lâche.
Pas grave. D'après Bob, si un silure est là, d'autres vont venir. Et ça ne manque pas !
15 minutes après, c'est sur ma canne que le départ a lieu, toujours de manière très discrète. A peine 5 à 6 mètres de fil sorti, au ralenti. Il faut avoir l'oeil et ne pas se déconcentrer !
Je prend la canne en main, détend le fil 2 ou 3 secondes ... et paf, ferrage de bucheron !
Un beau combat s'engage et, après 10 minutes, un magnifique silure rejoint le bateau. Je bat mon record de 2 centimètres : 2m05 ! Superbe !
Et pourtant, d'après Bob, c'est le poisson le plus petit de la semaine !?! Ainsi que la journée la moins prolifique en terme de prise.
Attention les yeux : en moyenne, ces clients ont sorti 3 poissons par jour pour une taille comprise en 2m10 et ... 2m60 ! Rien que ça. Les poissons plus petits ne bougent plus depuis quelques temps : aucun moins de 2 mètres sortis en 3 semaines apparemment. Etonnant et totalement inhabituel.
Quoiqu'il en soit, je suis aux anges ! Un décor splendide, un très gros poisson et des histoires de pêche à faire rêver les plus aguerris !
... et je ne vous raconte pas les récits de Bob sur les gardons de 2,5 kilos, les sandres dépassant 1 mètre ou les barbeaux monstrueux ... sinon vous allez bavez sur le clavier !
Merci Bob pour cette super journée !
Dernier jour
Objectif carpe !
Le matin, je serai au pôle-feeder, sur le même poste très profond qui semblait prometteur.
Au vu des casses de la dernière fois, des obstacles, et du courant omniprésent, j'ai vu lourd : le matériel est quasi-identique à ce que j'utilise pour le silure ! Bas de ligne en tresse 15 kilos, hameçon 6 et élastique doublé 3.8mm.
Quoiqu'il en soient, ça sent la bonne journée : j'arrive au lever du jour et les poissons sautent déjà de partout !
Je commence par sortir quelques petits carpeaux, ce qui est un peu galère avec 8 mètres de fond pour 11 mètres de canne : je déboite juste 2 éléments, c'est tout. Un peu lourd à manier pour remonter un poisson plus léger que le feeder ...
Puis sur une petite touche, l'élastique se mets à sortir ... et c'est parti ! Une carpe de 3/4 kilos rejoins l'épuisette ! Pas énorme, mais c'est toujours mieux que les petits machins de 100 grammes.
Je remets un pellet de 15 mm sur une bague en silicone, re-rempli le feeder, et cette fois c'est bon : ça repart et après 5 minutes de combat, voici une belle commune de 6 ou 7 kilos. Bon, je me rate sur la photo finale, heureusement que j'ai immortalisé ça avant ...
Ouf, la série des carpeaux est levé !
S'ensuit 2 autres belles carpes qui se décrochent.
Puis la canne se mets à plonger toute seule avant même que je puisse ferrer. Le poisson part direct dans le courant.
C'est du lourd ! La canne est pliée en 2 et l'élastique est au max : 7 à 8 mètres de sorti. Le combat sera très très tendu pendant plusieurs longues minutes... puis le poisson revient dans la zone plus calme, ouf !
La partie est gagnée et le voici qui arrive en surface : une magnifique commune !
Quel combat ! Il s'agit pourtant de mon matériel silure qu'elle a malmené ici ! De la dynamite ces carpes ...
Allez, le soleil (et la température) commence à monter : il est temps de rentrer.
Le soir même, je rebelotte, en mode carpiste cette fois (le reste du matériel étant déjà rangé pour le départ du lendemain ...).
En résumé : c'était pas la même limonade ! J'essuyerai 1 décroche et 3 casses : dans les algues à droite, le long des rochers au bord, dans le courant... Je sauverai l'honneur avec quand même un joli poisson !
Cette fois c'est vraiment fini, il faut tout ranger et se préparer à rentrer ...
Le lendemain
"Vous venez d'arriver à Paris, il pleut et la température est de 8 degrés."
Arg ...